Double projet, double vie
L’agent sportif est un métier capital dans la longue marche d’un joueur pour devenir footballeur professionnel. Préparation des contrats, sponsoring et surtout parcours scolaire, le conseiller pénètre dans l’environnement familial comme un nouveau parent. Son but ? La réussite du joueur…et dans certains cas…ramasser le pactole.
« Pour un club, le joueur en centre de formation, c’est du cash qui doit prendre de la valeur avec le temps » lance David*, agent de joueurs depuis cinq ans. Après l’obtention de sa carte d’agent sportif délivrée par la Fédération Française de Football (FFF), le natif de Strasbourg décide de prendre plusieurs jeunes joueurs sous son aile pour les aider à grandir. « Ce que je regarde en premier chez un joueur c’est bien évidement son potentiel sportif, indique-t-il. Mais ma façon de travailler m’oblige à prendre en compte son environnement extra-sportif. » Le conseiller traite avec le Milan AC, Toulouse ou encore des clubs de Ligue 2 pour placer ses pépites. Dans son travail, David attache une grande importance à l’environnement familial du joueur. « Si le gamin c’est Ronaldinho, mais qu’il ne vit pas dans un bon environnement, je ne vais pas m’intéresser à lui, » confie l’agent.
« L’école est secondaire »
La réussite du baccalauréat dans les centres de formation de football en France fait toujours la Une de l’actualité. Cette analyse est devenue un gage de qualité mais cache aussi plusieurs mystères. Selon l’agent plusieurs clubs auraient des accords avec les lycées pour faciliter l’obtention du diplôme. « Il ne faut pas se cacher, lâche David. Le joueur est visible seulement d’un point de vue financier par son club. L’école est secondaire, les exceptions sont très rares surtout dans le milieu du football ».
Pourtant, le rôle d’un agent est de conseiller son joueur sur sa carrière et de préparer une éventuelle reconversion dans le cas d’un échec lors du parcours sportif. Avec l’explosion du football business, les conseillers regardent en priorité l’avenir possible de leur protégé et décident donc de faire passer le côté scolaire au second plan. Cet acte est souvent décidé, lors d'une réunion en fin d'année, d’un commun accord avec les parents qui peuvent voir ici un apport financier important, très rapidement. L'objectif principal devient donc la signature du premier contrat professionnel. En raison d’un fort turn-over, la durée de carrière moyenne d'un joueur professionnel est d’environ neuf ans. Blessures, échecs sportifs, retraite anticipée et fin de carrière, l'agent doit, en principe, préparer un projet pour la post-carrière.
Un métier très peu contrôlé
C’est un problème majeur dans l’évolution des jeunes footballeurs. La présence des représentants non-diplômés ou des intermédiaires. « La licence d’agent est un gage de qualité surtout en France, lance le Strasbourgeois de 26 ans. Cela ne veut pas dire qu'ils sont excellents mais cela permet de savoir avec qui tu traites. » De plus en plus de personnes (entraîneurs, simple amateur de foot…) se prétendent comme des agents sportifs. Le taux de réussite à l'examen organisé par la FFF est inférieur à 20%, les places sont rares.
Pourtant ce métier est très réglementé par la FFF. Encore une fois, l’influence des parasites est simple, l’argent. « Ces personnes vont privilégier la relation sportive et ne vont pas accompagner le joueur sur une longue période, analyse l’agent. Ils sont présents pour prendre le joueur et l’envoyer dans un club avec au passage un petit chèque. » Cette technique de management est très difficile car les intermédiaires ne cherchent pas à connaître le joueur et regardent seulement le point de vue financier. Le scolaire est complètement oublié. Le conseil de David est sommaire mais important, « pour réussir dans ce métier, il faut comprendre le joueur et anticiper ses envies ».
*Le prénom de cet agent a été modifié pour l’écriture de l’article.
Nicolas Pelletier